Monologo di Felice sulla gravitazione universale
Alberto Manzoli
C’è un’altra cosa che non ti ho mai detto:
era aprile, era sole, e alla Volpara
io e i miei fratelli toglievamo i sassi
per preparare alla semina i campi;
e mentre loro poi con la carriola
li portavano tutti alla masera,
di colpo mi è venuta l’intuizione,
e ho cominciato a lanciarli per aria,
li lanciavo per aria e li guardavo
cadere, lanciavo e guardavo, e loro:
« Ma cosa fai, Felice? Sei coglione? ».
E io, che cosa mai potevo dirgli?
Ché chissà quante volte ti è successo
e non ci hai fatto caso: prendi un sasso,
un sasso qualunque, dove ti pare,
e lancialo in cielo con tutta la forza,
parabola a salire, in pieno sole;
e in un momento, meno di un respiro,
un attimo: il miracolo, l’attesa,
nell’aria ferma di un cielo di vetro,
nella splendida luce che lo avvolge
né volo né caduta, un istante,
e poi la terra che se lo riprende.
E adesso però applica il sistema
alla vita delle persone, e vedi
che ognuno vola a modo suo nel mondo,
ma che una cosa soltanto ha importanza:
tornare al suolo carico di sole
avendo assaporato l’aria pura,
la spaventosa gioia di volare,
non rimanere tra le cose andate,
un sasso abbandonato alle masere e,
vivo o morto, non essere che luce.
(extrait de Lux Interior)
Le monologue de Félix sur la gravitation universelle
Alberto Manzoli
Il y a autre chose que je ne t’ai jamais dite:
c’était en avril, il y avait du soleil, et à la Volpara
mes frères et moi retirions les pierres
pour préparer les champs aux semailles;
et pendant qu’eux, avec la brouette
les emportaient à la décharge,
subitement m’est venue une idée,
et j’ai commencé à les lancer en l’air,
Je les lançais et les regardais
tomber, je lançais et je regardais, et eux :
« Mais qu’est-ce que tu fais, Felix ? T’es con ? »
Et moi, que pouvais-je bien leur dire ?
Qu’on ne sait combien de fois cela nous est arrivé
Sans qu’on y prête attention : tu prends un caillou,
Un caillou quelconque, où tu veux,
et tu le lances dans le ciel de toutes tes forces,
il monte en parabole, en plein soleil ;
et en un instant, moins d’un souffle,
une seconde : le miracle, l’attente,
dans l’air immobile d’un ciel de verre,
dans la splendide lumière qui l’entoure
ni vol ni chute, un instant,
et puis la terre le reprend.
Et alors, maintenant, applique le dispositif
à la vie des gens, et tu réalises
que chacun vole à sa manière dans le monde,
mais qu’une seule chose a de l’importance:
revenir au sol chargé de soleil
ayant goûté l’air pur,
la terrifiante joie de voler,
ne pas rester parmi les choses perdues,
un caillou abandonné à la décharge et,
vivant ou mort, n’être que lumière.
(trad. Marilyne Bertoncini)
L’auteur : Alberto Manzoli est né le 13 novembre 1962 à Parme, la ville où il vit et travaille toujours. Certains de ses poèmes ont été publiés dans des anthologies et des magazines, il a remporté des prix et nominations dans divers concours littéraires, dont le prix Ignazio Silone et le prix Raffaele Nesci. Il est membre du jury du Concours de poésie inédite Tapirulan depuis la première édition. La Cruna del’ago, publié en 2011, est son premier recueil de poèmes, suivis chez le même éditeur de “Parma di Francia” ( 2015) e « Lux Interior » (2020.)